31 mai 2015

OUI aux bourses d'étude - OUI à l'égalité des chances

Le débat sur l’initiative populaire en faveur des bourses d’études se déroule actuellement dans un climat particulier. Une partie des médias ont fait le choix de ne pas traiter cet objet de votation, qui se fait donc très discret. Alors que la formation doit être la force de la Suisse, cette attitude est incompréhensible. Parallèlement, les opposants à l’initiative et le Conseil fédéral en tête manient le double discours, affirmant dans les débats soutenir une augmentation des moyens pour les bourses d’études mais dans un cadre strictement fédéraliste. Les mêmes votent pourtant systématiquement l’inverse tant au niveau fédéral que cantonal.

En réalité, les opposants espèrent surtout que ce sujet – sur lequel ils sont très mal à l’aise – disparaitra vite de la discussion politique de notre pays. Et le malaise est compréhensible, tant le système actuel ne fonctionne pas et tend à se détériorer année après année.

Un système insuffisant et inégal
Ces deux adjectifs caractérisent parfaitement le système actuel des bourses d’études en Suisse.

  • « Insuffisant », tout d’abord, parce que, depuis 25 ans, nous assistons à une baisse des dépenses en faveur des bourses d’études, tant de la part de la Confédération que de plusieurs cantons. Le montant total a baissé de 8% depuis 1990. Il faut ajouter à cela l’augmentation du nombre de personnes en formation durant la même période (+30% rien que pour ces dix dernières années). Ainsi, en 2012, un triste record a été atteint : celui du taux le plus bas, depuis 1990, du nombre de personnes en formation post-obligatoire ayant reçu une bourse d’études (à peine plus de 7%).
  • Mais aussi « inégal » : en effet, le fait de se voir attribuer ou non une bourse, ainsi que le montant de l’allocation, dépend davantage du canton de la personne en formation que de sa situation financière. Entre deux cantons voisins, la bourse peut aller du simple au double. A titre d’exemple : un jeune du Chablais vaudois touchera en moyenne une aide deux fois plus élevée qu’un jeune Valaisan habitant à quelques kilomètres. Devant ces 26 systèmes cantonaux différents, l’égalité des chances n’est absolument pas assurée.





Même le Conseil fédéral reconnaît dans son « Message » les graves lacunes du système et la non-réalisation de l’idéal d’égalité des chances. Un chiffre illustre bien cette situation : depuis des décennies, la proportion d’étudiants parmi les enfants d’ouvriers stagne autour de 5%.

Sans l’initiative, rien ne changera
Contrairement à ce qui a été dit par le Conseil fédéral lors de sa conférence de presse sur le sujet, rien ne changera en cas de « non » à l’initiative. Le contre-projet voté par le Parlement n’encourage pas l’harmonisation puisqu’il n’oblige absolument pas les cantons à respecter le concordat pour obtenir les contributions fédérales. Ma proposition allant dans ce sens a finalement été rejetée par les Chambres. De même, le Parlement a refusé une proposition demandant d’attribuer les contributions fédérales en fonction des dépenses des cantons en matière d’aides à la formation, et non en fonction de la population. Ce mécanisme incitatif a été coulé, tout comme la demande d’augmentation des moyens fédéraux pour les bourses d’études. En somme, toutes les propositions concrètes ont été supprimées du contre-projet, qui n’est plus qu’une coquille vide.

Ainsi, en cas de refus le 14 juin, rien ne changera. Les moyens continueront de baisser et ce n’est pas un concordat minimaliste et non-contraignant qui permettra de gommer les disparités cantonales. La seule réponse crédible est aujourd’hui l’initiative de l’UNES. Sans elle, les élu-e-s du pays continueront d’ignorer le problème.

Une initiative réaliste
L’initiative sur les bourses d’études pose un objectif clair : assurer que chaque jeune puisse suivre la formation qu’il souhaite, en fonction de ses capacités et de sa motivation, et non du porte-monnaie de ses parents. Cela sera valable pour toutes les filières de formation de degré tertiaire (universités, HES, HEP, formations professionnelles supérieures,…). Il ne s’agit pas d’une politique de l’arrosoir mais d’une aide ciblée pour celles et ceux qui en ont vraiment besoin, afin de permettre à toutes les personnes en formation de s’en sortir, en complétant – lorsque cela est nécessaire – leurs ressources, provenant généralement avant tout d’un apport familial et d’un « petit boulot » d’étudiant. Rappelons au passage que ¾ des étudiant-e-s travaillent à côté de leur formation, ce qui est le taux le plus élevé d’Europe. Si le fait de travailler pour financer ses études n’est pas un problème en soi (et apporte sans doute beaucoup au jeune également), cela peut se faire jusqu’à un certain point et se révèle être particulièrement complexe dans certaines filières d’études.

Notons d’ailleurs que, contrairement aux propos des opposants, l’initiative ne propose pas une centralisation. Les commissions cantonales des bourses continueront d’analyser chaque situation individuelle au cas par cas mais les moyens seront plus importants et les critères d’attribution seront harmonisés.

La formation, c’est l’avenir !
Certains osent aujourd’hui pointer du doigt le coût d’une telle initiative. Peut-être est-il nécessaire de commencer par rappeler que les bourses d’études ne représentent qu’un pourcent des dépenses publiques en faveur de la formation. Sans changement, la Suisse risque bien de posséder demain des écoles reconnues au niveau international, mais qu’une grande partie de sa jeunesse ne peut même pas fréquenter, faute de moyens. Rappelons également que le manque de personnel qualifié nous coûte chaque année plusieurs milliards ! Surtout, il nous faut répéter : investir dans la formation, c’est investir dans la jeunesse, dans l’avenir de notre pays, dans la seule véritable richesse de la Suisse.

Pour un système de bourses d’études juste et équilibré, pour soutenir les familles qui en ont vraiment besoin, pour assurer l’égalité des chances, un grand OUI le 14 juin !


Mathias Reynard
Conseiller national
Membre de la Commission de la Science, de l’Education et de la Culture (CSEC)

1 commentaire:

  1. Merci Mathias pour cet article!
    D'ailleurs, contrairement aux jeunesses valaisannes de droite, des jeunes UDC ont eu le courage d'aller contre les cadres de leurs partis, de défendre la jeunesse et la formation et donc de voter aussi OUI à l'initiative sur les bourses d'étude! C'est assez rare et remarquable pour qu'on le souligne, et qu'on prouve en passant que nous ne sommes pas des anti-udc primaires! ;)

    RépondreSupprimer

Les commentaires sont soumis à un modérateur indépendant.
Ils sont donc publiés avec un temps de retard.
Les esprits s'échauffant au-delà du raisonnable et des bienséances en période électorale, il y a nécessité de le faire, le blog étant responsable devant la loi des éventuelles insultes qui y seraient publiées.
Il n'y a pas de censure politique. Mais l'idée que la terre est plate n'est pas une conviction politique.
Les utilisateurs ANONYMES sont tolérés, mais la modération des commentaires anonymes répond à des critères plus sévères. Merci de votre courtoisie. De manière bien évidente les commentateurs anonymes ne pourront pas être informés des raisons de la modération éventuelle de leurs assertions.